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Note aux lecteurs égarés ici :

Ceci est un blog somme toute assez personnel, voire intime. Je n'y publie pas régulièrement, au point que l'on pourrait se demander s'il a vraiment une utilité. Pour moi il en a une. Ce ne sont souvent que des billets d'humeur, parfois des réponses à des commentaires ou à des articles non-cités. Parfois c'est -très humblement- poétique, parfois c'est chirurgical. Parfois c'est très noir, voir gênant, parfois ce n'est que joie du quotidien. Sans transition. Parce que je suis ainsi, mais qu'il n'y a qu'ici que je peux faire sortir ça de cette façon.


Certains textes peuvent être violents, parce qu'ils parlent avec crudité de sexe, de troubles du comportement alimentaire, de dépression, ou de viol. Ceci est donc un avertissement à l'attention de ceux qui ne souhaitent pas s'y confronter.

6 juillet 2015 1 06 /07 /juillet /2015 16:09

C'était trop beau pour continuer.

Je ne sais pas quand, comment, ni pourquoi mais j'ai recommencé tout doucement à aller mal, à m'enfoncer de nouveau lentement dans cette spirale infernale qui finira bien par me bouffer en entier un jour.

Je ne sais même pas quoi dire, je ne peux pas parler, je suis bloquée.

Je suis fatiguée, tellement fatiguée de ces montagnes russes.

Je suis infoutue de m'occuper de quoi que ce soit, ni de moi ni de mon fils, ni de rien du tout.

Je ne fais que pleurer et penser à comment je pourrais arrêter tout ça, la réponse la plus fréquente étant : mourir.

Je ne sais pas quoi faire, je ne sais pas comment me sortir de là, je ne sais pas qui appeler à l'aide, je ne sais même pas comment appeler à l'aide. Alors je pose ça ici sans espoir de réponse comme une pauvre andouille que je suis.

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19 mars 2015 4 19 /03 /mars /2015 10:10

Encore un petit bilan, pour vous dire où j'en suis maintenant dans ma vie, dans mes démarches, dans ma santé.

 

Je suis suivie au CMP (Centre Médico-Psychologique) dont je dépends par une psychiatre (qui change malheureusement régulièrement, mais pour l'instant elles ont toujours été chouettes. Et oui, toutes des femmes pour le moment. ) depuis environ un an et par une psychologue que je n'ai vue qu'une seule fois pour le moment, mais avec qui je vais avoir rendez-vous tous les 15 jours. J'ai essayé divers traitements médicamenteux qui ont plus ou moins fonctionné avec divers effets secondaires, mais on s'est dernièrement fixées, depuis un peu plus d'un mois, sur de la Venlafaxine, un IRSNa ( : inhibiteur de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline ;  un psychotrope antidépresseur et anxiolytique donc.) couplée à de l'Aripiprazole (Abilify), un neuroleptique atypique, de la sous-classe des antipsychotiques. Brrr que des mots flippants. Mais, en bref : c'est bien. C'est le mieux de tout ce que j'ai pu essayer et la différence est flagrante. Vraiment. Je me sens mieux, j'ai une activité qui commence à revenir à la normale, plus d'idées morbides, moins d'anxiété, même s'il en reste et je me sens globalement bien.

 

On m'a enfin diagnostiquée comme ayant un Trouble de la Personnalité Limite (appelé aussi Etat Limite, ou "Borderline".) et ça fait énormément de bien d'avoir enfin un nom à poser sur tout ce par quoi j'ai pu passer. ENORMEMENT. Ca concorde avec mon instabilité, mon impulsivité, mon hypersensibilité, ma gestion (moisie) des relations interpersonnelles, mes troubles de l'attention et de la concentration ainsi que mes problèmes d'image de moi.  Mes TCA rentrent aussi dans le schéma. Se dire qu'il y a un nom, une pathologie, un schéma, un cadre dans lequel tout ce que j'ai vécu rentre, oui ça fait un peu peur, mais ça fait REELLEMENT du bien. Comme dit récemment à ma psy, enfin je vais pouvoir me dire que non je nesuis pas "juste" un sale caractère chiant et paresseux, que je ne le fais pas "exprès" (oui, parce qu'il m'arrivait encore de le penser au fond de moi, hein, des fois, en culpabilisant à fond les ballons. ). Enfin, si on me pose des questions, je pourrai répondre plus précisément, j'aurai un diagnostic pour faire "autorité", pour expliquer.

Bref, rien que ça, ça fait tellement de bien, donc je vais mieux.

 

Pour le reste, j'arrive à me lever le matin sans problème, j'arrive à sortir de chez moi idem, je me suis lancée dans le tricot et plus récemment le crochet, je me suis remise à la couture et aux perles. Je vis, quoi. Des trucs qui paraissent normaux à la plupart des gens, mais qui pour moi ont été si difficiles. Et surtout, surtout je finis des choses. Celleux qui m'ont suivie toutes ces années et les plus proches d'entre celleux qui vont me lire ici savent à quel point ça a été un problème récurrent chez moi : ma peur et mon incapacité totale à terminer les choses. Arriver au bout d'un tricot et me dire "je l'ai fait" est donc une délivrance intense pour moi et je ressens enfin ce que ça fait d'avoir un pied dans les petits bonheurs quotidiens. Je me sens enfin "capable", "en capacité" de faire des choses de A à Z.

Par ailleurs, je dors plus et mieux. Je ne compense plus mes quelques excès de nourriture, et il y en a quelques-uns. J'ai maigri puis regrossi, je crois. Toute la nuance de mon état tient dans ce "je crois". Ca fait plusieurs semaines, plusieurs mois, que je ne me suis ni repesée, ni surtout, puisque c'est mon échappatoire habituelle à la balance, mesurée. Et je n'ai pas l'intention de le faire dans les prochains jours.

 

Voilà. Je crois avoir fait le tour pour le moment.

 

Pour celleux qui m'ont suivie uniquement ici, je voulais juste dire que je ne reviendrai probablement que sporadiquement pour donner des nouvelles ou si ça ne va plus, mais que je blogue au sujet de mes petites (et parfois plus grandes) créations, plus régulièrement maintenant, sur une nouvelle adresse (clic clic), si le coeur vous dit de passer me faire un coucou et/ou voir ce que je deviens.

Voilà. Je vais plutôt bien. ^_^

Bien à vous, tout ça.

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2 juin 2014 1 02 /06 /juin /2014 10:05

On m'a posé une question sur le site ask.fm , comme le nombre de caractères n'était pas suffisant j'y réponds ici.

 

C'est une question compliquée en fait. C'est difficile de remonter au commencement quand c'est changeant comme ce que je vis. Je vais essayer d'expliquer, mais ça risque d'être confus et long...
Je pense qu'il y avait déjà des problèmes alimentaires quand j'étais toute petite, mais je ne sais pas trop si c'était au final les miens ou ceux de mon entourage, et je ne sais pas trop si ça tenait de la pathologie ou d'un truc "pré-pathologie" (c'est difficile à expliquer).
Par exemple j'ai appris assez récemment que ma soeur tout bébé avait eu une période où elle ne s'alimentait plus qui avait été très anxiogène pour ma mère, et que visiblement ça a eu un fort impact sur elle, et qu'elle avait tendance à me gaver quand je suis née qui viendrait peut-être de là. Cette tendance au gavage était de toutes façons aussi quelque chose de très fréquent à l'époque, les laits enrichis, les farines dans le biberon (ça se fait encore, mais quand même moins), la soupe à un mois et demi (véridique dans mon cas), totu ça c'était très encouragé par le corps médical etc. Ca a quand même pas mal changé. Pour cette part donc, ce ne sont pas des souvenirs, mais des faits racontés par la famille.

Cette tendance au gavage bébé, on la trouve encore par la suite : je passais énormément de temps avec/chez mes grands-parents qui glorifiaient beaucoup le fait d'avoir "bien" (au sens beaucoup) ou tout mangé ce qui était à disposition. J'étais une enfant gourmande et qui mangeait vraiment de tout sans rechigner. Pourtant quand j'ai commencé à moins manger, ou à exprimer des dégoûts pour certains aliments, (tout en étant toujours très gourmande et pas difficile avec les aliments rebutant le plus couramment les enfants, en tous cas rebutant ceux de ma famille.) ça s'est très mal passé, tant avec mes parents qu'avec mes grands-parents. J'ai des souvenirs assez traumatiques de scènes humiliantes où j'avais interdiction de quitter la table si je n'avais pas fini mon assiette, même si ça me rendait malade, même si je devais en vomir ensuite. (Au passage j'ai des souvenirs du même genre à la cantine de l'école, même si en version moins violente)
Ca pose déjà un cadre assez spécial, disons. A savoir qu'en même temps les premières réflexions sur mon corps  et sur mon appétit par ma famille avaient déjà lieu simultanément. C'était pas encore des vraies critiques mais des petites choses insidieuses sur mon fessier bien rebondi, ou sur mon appétit gargantuesque (oui, c'est totalement paradoxal avec le fait qu'on me refusait le droit de ne pas avoir faim ou ne pas avoir envie de manger.), comme par exemple le "il vaut mieux t'avoir en photo qu'en pension" pour dire que je dévorais...


Je crois que j'ai commencé les trucs genre voler de la nourriture, en cacher, voire en acheter seule en primaire, mais je ne saurais pas trop dire à quel âge. Je me faisais des sortes de "crises" où j'allais acheter des bonbons et où j'engouffrais tout en cachette. Evidemment à l'époque je ne voyais pas le problème et je ne sais même pas aujourd'hui si c'était déjà quelque chose de pathologique ou si c'était simplement des "bêtises" courantes d'enfant sur la base d'envies : les bonbonspar exemple étaient plutôt interdits chez nous.

Bref donc en primaire je faisais ça. Puis il y a eu le collège et la puberté. Parallèlement je vivais un abus d'ordre sexuel par un membre de ma famille. Je crois que c'est au début du collège que j'ai vomi pour la première fois après une de mes petites séances de bouffe cachée. C'était pas volontaire il me semble, c'était juste que je m'étais rendue malade en fait, mais je ne sais pas trop comment j'ai fini par me faire vomir comme ça de temps en temps, pas de façon régulière.


Ma mère a fini par s'apercevoir que je "grignotais" dans mon coin et comme avec la puberté and co je m'étais pas mal arrondie, elle m'a conduite chez une diététicienne (ou nutritionniste, je ne me souviens plus bien.) Je faisais alors 1m69 pour environ 66kg. Pas de quoi fouetter un chat, avec le recul. Mais j'étais vraiment persuadée d'être obèse, en fait. Mon entourage et en particulier ma mère (mais aussi les camarades à l'école, etc) avait réussi à me persuader de ça. C'est chez la diét donc que j'ai appris à tenir des petits carnets alimentaires.  Et à force de noter, même si j'étais pas dans une période où je faisais beaucoup de "crises" comme expliqué plus haut, j'avais l'impression que je mangeais des quantités folles de nourriture. Je ne sais plus trop comment se sont passés les rdv avec la diét', j'en garde pas vraiment de souvenir. De toutes façons, l'été de la fin du collège est arrivé, j'ai "fondu" et pris mes derniers cm, au début de ma classe de seconde je faisais donc 1m72 pour 57-58kg. J'étais pas mal sportive depuis l'enfance et en fait les moments où je prenais du poids correspondaient aux moments où j'arrêtais un sport. Par exemple au collège je faisais dans le même temps de l'équitation, de la danse et de la gym. J'ai arrêté l'équitation pour des raisons d'ambiance qui ne me faisait plus envie et en prétextant mes chevilles hyperlaxes et fragiles. La danse, c'est un peu pareil, j'ai raconté sur Twitter comment j'en étais venue à arrêter et l'ambiance pourrie qu'il y avait. De trois sport, je suis donc passée à un seul : la gym, le mercredi aprèm. Que j'ai arrêté à la fin du collège puisque c'était dans le cadre de l'asso sportive du-dit collège. Au lycée, parallèlement à ma "fonte", je me suis lancée à corps perdu dans l'aïki taî do, de 2 à 3 séances par semaine d'environ 2h-2H30 chacune. Et je me suis mise à aller à la piscine pour nager pendant mon temps libre ou à partir faire de longues balades à vélo. Mon poids me tarabustait toujours, même si j'étais beaucoup plus mince. J'avais l'impression d'être en surpoids. Je faisais encore des "crises" de temps en temps, sans que ça soit régulier.

 

C'est quand j'ai quitté la maison après le bac (et que j'ai donc arrêté les acti sportives hebdomadaires), que mon alimentation est devenue plus problématique. La première année je me suis lâchée complètement sur la bouffe. Je me faisais des séances de fast food à coups de 3 menus. Je ne vomissais plus à l'époque. Je compensais ensuite en ne mangeant plus rien pendant une semaine. C'est au cours de mes années de fac à Lyon que c'est devenu franchement flippant. C'est à ce moment que je me suis mise à me restreindre tous les jours. Je tournais à 500 calories par jour grand maximum, et évidemment je crisais régulièrement. Parallèlement j'ai entamé une jolie dépression et une phobie sociale "partielle" assez cheloue. A Lyon, je m'enfermais dans mon appart d'étudiante et je ne sortais plus que pour quelques courses essentielles à mes crises, je n'allais plus à la fac, je ne sortais plus dans la rue, tout me faisait peur et m'était trop dur. Mais je rentrais chez mes parents un week-end par-ci par-là et là je me comportais totalement à l'inverse: je passais le week-end dehors. Je sortais, je me défonçais la tronche tout le week-end, je voyais plein de monde et j'évitais la maison de mes parents comme la peste. Je crois que c'est à cette époque de la fac que tout a commencé vraiment "en grand". C'est là que je me suis mise à me restreindre tout le temps et à me faire vomir très régulièrement. Ca a continué après mon retour dans ma ville, toujours avec des phases alternées de restriction, de boulimie et d'hyperphagie.

Voilà. Je crois que j'ai fait le grand tour du "commencement".

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31 mars 2014 1 31 /03 /mars /2014 15:06

Sur Twitter j'ai fréquemment évoqué que lorsqu'on souffre de TCA et qu'on a un IMC ou une silhouette "dans la norme" ou en léger surpoids, on est fréquemment invisibilisé. Voire même lorsqu'on est obèse ou en surpoids/sous-poids, si ce TCA nous fait perdre du poids, on est encouragé, félicité (et toujours invisibilisé) grâce à la fameuse glorification de la minceur et de la perte de poids prétendue saine. Les médecins ne remarquent rien, ne nous croient pas dans certains cas où l'on arrive à en parler et l'entourage encore moins. Mais il y a quelque chose dont j'avais moins parlé sur Twitter mais qu'on retrouvera souvent dans mes écrits de blogs plus personnels sur mes sentiments, mes sensations : l'illégitimité qu'on ressent en tant que malade.

J'y ai pensé justement hier soir suite à une discussion avec une amie qui m'écrivait à quel point elle ne s'était pas sentie à sa place dans un groupe de parole sur les TCA où elle était la seule à ne pas être une anorexique avec une silhouette très maigre. Ca l'avait mise très mal à l'aise et elle s'était justement sentie illégitime dans ce groupe parce que "trop grosse" par rapport aux autres. Alors évidemment, l'inévitable comparaison entre malade et la dismorphophobie jouent un rôle dans cette anecdote, mais il n'empêche que le malaise est bien là.


Le discours dominant en la matière c'est que si tu es obèse ou maigre -et encore pour le sous-poids, ça dépend beaucoup des milieux-, tu as forcément un problème avec l'alimentation et avec ta santé. Mais si tu as une silhouette ou un IMC dans la norme, ou légèrement à côté de la norme, c'est que tu es forcément en bonne santé et que tu n'as aucun problème. Sauf que NON. De même, si tu maigris -dans une certaine mesure-, c'est forcément bien. La perte de poids est perpétuellement glorifiée, comme si c'était forcément le choix et le but de la personne concernée de maigrir. Personne ne se demande si en réalité, tu n'as pas choisi/tu es malade/tu préférais ton corps avant/autre. 


Or tous les propos fréquemment entendus qui banalisent les TCA participent aussi à ça. Lorsque j'entends un proche me dire "Ohlala regarde cette fille toute maigre sur le trottoir d'en face ! Pfft encore une anorexique ! " cinq minutes après m'avoir félicitée parce que j'ai "fondu", ça me donne envie de hurler. De hurler "TA GUEULE, FOUS LA PAIX A CETTE MEUF ! " en premier lieu, mais aussi "PAUVRE CRETIN-E TU NE VOIS PAS QUE JE SUIS JUSTEMENT MALADE ET QUE TU VIENS DE ME FELICITER POUR MA MALADIE ?!" (ce que je ne fais pas parce que ce n'est pas dans ma nature surtout en ce moment, je me contente généralement de dire quelque chose comme "les troubles alimentaires ça ne se voit pas forcément sur ton corps, tu ne sais juste rien de cette fille." ce qui me vaut déjà des roulements d'yeux exaspérés et des soupirs dubitatifs parce que les gens préfèrent souvent simplement qu'on aille dans leur sens sans réfléchir. )

Alors, pour être parfaitement claire, la personne en face de moi NE PEUT PAS SAVOIR que je suis malade si je ne le lui dis pas. (Et encore, ça se discute, l'entourage proche s'il est un minimum informé peut remarquer des comportements qui posent problème.) Mais bon sang, si les gens pouvaient, si VOUS pouviez vous abstenir de ce genre de réflexions stupides, tant les mélioratives que les péjoratives, sur le poids ou la silhouette des personnes que vous les connaissiez ou non, on avancerait déjà peut-être un peu tous : les personnes malades et invisibles se sentiraient moins mal et illégitimes et les personnes qui vivent bien leur corps ou leur alimentation n'auraient pas à batailler pour prouver qu'elles n'ont pas de problème d'alimentation. Gardez vos "tu as maigri, c'est super !" et compagnie. Taisez-vous si vous ne savez pas.


Tout ceci m'amène à penser à ma situation personnelle et à mes rendez-vous au CMP que je n'avais pas trop regardés sous cet angle, malgré le malaise diffus que je ressentais. La conclusion, c'est que là-bas je me suis encore confrontée à l'invisibilisation et à ce fichu sentiment d'illégitimité. Le premier truc dont j'ai parlé à mon premier rendez-vous, ça a été mon comportement alimentaire. Et ça a été une torture pour moi, tellement c'était difficile d'en parler. L'infirmière n'a pas relevé et m'a laissée continuer à parler. C'est lorsque j'ai abordé ce qui a plutôt trait à la dépression qu'elle s'est "intéressée". C'est là qu'elle a vraiment posé des questions, demandé des détails, compati ; c'est aussi ce dont elle m'a reparlé aux rendez-vous suivants. De l'alimentation il n'a plus été question. Et comme la bonne petite fille bien dressée que je suis, je n'ai pas réabordé le sujet. 


Le problème c'est que pendant ce temps-là, entre les rendez-vous, je vis mes TCA au quotidien, je perds du poids, de l'énergie, des morceaux de dents, j'ai mal à la gorge, au ventre, j'ai probablement de belles carences qui s'installent tranquillement dont on ne saura jamais rien, puisqu'on ne les cherchera pas s'il m'est impossible de parler ou s'il m'est impossible d'être entendue lorsque j'en parle. Tout ceci n'a probablement pas d'importance, n'est-ce pas, puisqu'on me prend par contre au sérieux pour la dépression et qu'on m'envoie voir une psychiatre pour ça. Mais si elle aussi balaie à son tour d'un revers de main mon comportement alimentaire ? Comment fera-t-elle ensuite pour comprendre pourquoi le traitement ne marche pas alors que je n'arriverai pas à lui dire que les cachets je les vomis probablement avec le reste ? Comment comprendra-t-elle qu'avec tout ce qu'elle me donne, je n'ai toujours pas d'énergie alors que je serai incapable de lui parler de mes journées à 300 calories ?

Alors oui, ce sont ici des peurs et non des faits que j'exprime. Mais si j'ai si peur, c'est justement parce que j'ai DEJA vécu ça. Je sais que c'est une forte possibilité. Je sais qu'un soignant peut tout à fait me dire "vous n'avez qu'à faire un régime plus raisonnable", comme si c'était de ça qu'il s'agissait, parce que c'est DEJA arrivé. Parce que combien de soignants ne se sont intéressés à mon alimentation que lorsque j'étais en surpoids ou obèse uniquement dans le but de me dire que je devrais suivre un régime ?

 

Le pire dans tout ça au final ? Mon esprit malade en vient à se dire que je ne suis pas assez malade et que je devrais l'être plus d'ici mon rendez-vous avec la psychiatre. Pour avoir de meilleures "chances" d'être prise en charge.

 

Mon esprit est très malade, oui. Et la société avec.


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21 mars 2014 5 21 /03 /mars /2014 12:37

On en est là.

Je suis assise en train de tourner et de retourner les mots en boucle dans ma tête. Mais vas-y, bordel, parle-lui. Parle-lui des 4 kg que tu as perdu cette semaine, parle-lui de ton alimentation constituée de café, parle-lui de ta dent qui est tombée, parle-lui de tes nuits à 2 ou 3h de sommeil, des journées qui te sont insupportables, des tics incessants dont tu ne peux pas te défaire, des repas qui te sont odieux, de la fatigue, de ces moments où tu ne peux même pas te lever, de ce malaise que tu as fait ce matin en venant, dis-lui à quel point c'est insupportable de voir ton enfant manger, à quel point c'est insupportable de le voir ne pas manger. Dis-lui la honte d'avoir vomi devant lui, dis-lui le sentiment de vide qui t'habite la majeure partie du temps, dis-lui que tu as failli ne pas venir ce matin, dis-lui que tu as envie au fond de dynamiter cet espace où tu devrais pouvoir parler, dis-lui les journées où tout n'est qu'abandon, dis-lui que tu ne peux juste plus.

Mais non.

Je me suis juste contentée d'un petit "je ne peux plus" et d'un minuscule "je ne vois pas comment je vais tenir encore une semaine." puis de mes habituels "je ne sais pas" "comme vous voulez". Et la seule réponse que j'ai entendue, la seule réponse que je ne voulais pas entendre. "L'urgence, c'est de vous donner quelque chose pour aller vite mieux. D'ici là, il va bien falloir faire sans. Ménagez-vous du temps pour vous. " Alors que justement je ne peux pas ménager du temps pour moi. Pas plus que ce que j'ai déjà. Les activités pédagogiques et ludiques sont déjà devenues du "temps [plus ou moins] pour moi" en se réduisant comme peau de chagrin au profit d'un mollasson "Joue un peu seul, mon coeur, Maman n'est pas bien du tout là, elle a besoin de se reposer." Mais évidemment qu'il ne veut pas jouer seul. Evidemment. Il a deux ans. Alors je m'endors à moitié en lui lisant le livre ou en l'aidant à faire son puzzle. Alors je me réveille en sursaut quand il me saute sur le dos pour attirer mon attention, j'ai mal, je suis énervée et encore plus épuisée que 10 minutes avant.

 

"Un truc pour aller mieux". Les médicaments. Ce qui m'est proposé comme ultime solution parce qu'on a décidé pour moi que je n'avais pas envie de voir un psy, que je n'avais pas envie de parler réellement, faute de budget, faute de disponibilité. Les médicaments. Quelle ironie. Je sais déjà comment ça va se passer. Je les prendrai, je ne verrai aucun changement à part les effets secondaires horribles qui me descendront encore plus. Migraines, nausées, pertes de mémoire, défaut de concentration, vertiges. Comme si je ne subissais pas déjà suffisamment tout ça. Je tiendrai un peu, je les prendrai comme il faut, au moins jusqu'à ce que les maux liés disparaissent ou s'atténuent. Un mois. Deux. Peut-être trois, qui sait ? Puis j'arrêterai brutalement. Ca ne changera rien à mon état. Juste à nouveau les effets secondaires affreux. Je les planquerai. Je les stockerai. Je n'irai plus aux rendez-vous, j'éviterai consciencieusement les appels inquiets des soignants, s'il y en a. Et le jour, l'heure, l'instant T où ça sera trop dur, où j'en aurai trop marre, je prendrai tout d'un coup noyé dans la vodka. Parce que c'est la seule chose que je sais faire. Parce que c'est ce que j'ai déjà fait. Parce que c'est ce que je fais. Et si j'en réchappe, ça me sera un électro-choc parce que je ne veux pas mourir, au fond. Alors je me forcerai, j'irai un peu mieux. Mais pas vraiment bien. Comme d'habitude. Et ce jusqu'à la prochaine descente aux enfers, parce que c'est comme ça que je fonctionne.

 

Je voudrais juste apprendre à vivre normalement. Je voudrais juste apprendre à vivre avec moi. Parce que je suis fatiguée de moi.

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25 février 2014 2 25 /02 /février /2014 22:01

Ca ne va pas. Je déteste commencer comme ça mais je ne vois pas comment le dire autrement.

Je me sens complètement "en dehors de moi" les trois quarts du temps. Je n'arrive plus à écrire, en tous cas plus de façon à peu près régulière. Je ne peux donc même plus "exorciser".

C'est épuisant de tout garder en dedans.

 

Même les réseaux sociaux qui m'ont longtemps supportée -dans tous les sens du terme- ne me sont plus d'un grand secours. Je m'y sens de moins en moins à l'aise au fil des jours. Ma paranoïa* m'y poursuit. Je passe de longues heures à m'inquiéter de ce que l'on y a dit ou pensé de moi. Je suis obsédée par l'idée que des gens que j'apprécie me détestent... Et j'en ai honte, tellement honte. Je me sens complètement minable de ne pas pouvoir me détacher de cette idée que je me fais du regard des autres.

 

J'ai l'impression d'être complètement stupide. Autant à cause de cette pression maladive que je me créé qu'à cause de ma peine à trouver mes mots, de ma maladresse souvent consternante quand je tente de m'exprimer, de cette difficulté que j'ai à aligner un discours de façon cohérente. Je me sens complètement diminuée, amoindrie, appauvrie... J'ai de plus en plus de mal à lire, à comprendre ce que je lis. Ma mémoire déjà bordélique me parait encore plus fuyante. Et j'ai honte pour ça aussi. Honte d'être idiote et amnésique la plupart du temps.

 

Je ne sais pas à quoi c'est dû. Je ne sais pas si je suis malade physiquement, je ne sais pas si je suis malade mentalement, je ne sais pas si c'est juste un effet de la fatigue, je ne sais juste pas... J'aimerais avoir un nom, quelque chose, un diagnostic à poser sur cette impression que ma raison et mon esprit s'effilochent de plus en plus.

C'est ausi pour cette raison que je n'écris presque plus d'ailleurs, parce que je n'arrive plus à terminer ce que j'écris, je n'arrive plus à suivre un fil conducteur, je me sens vide avant d'avoir fini alors j'arrête et laisse tout en plan. Mon blog regorge de brouillons laissés à l'abandon, tant sur ordi que sur papier. Et ça me frustre incroyablement. Alors pour échapper à la frustration, j'essaie de ne plus essayer. Parce que chaque arrêt au milieu d'une phrase sonne comme un échec dans mon ventre. Ca me rend complètement malade.

J'ai déjà passé de nombreuses heures réparties sur 3 jours à tenter d'aligner tout ça sur un cahier et je ne sais même pas si c'est cohérent, je suis trop effrayée pour relire.**

 

Bref. Cet article se voulait à la base une sorte d'état des lieux. A ce que j'ai déjà listé s'ajoute une alternance de journées à moins de 500 calories et de journées gouvernées par les hyperphagies prandiales. Du moins je crois. J'avoue avoir l'impression que c'est à nouveau de plus en plus difficile pour moi de me rendre réellement compte de ce qui est "trop" ou "pas assez". J'en viens à nommer et à penser "hyperphagie" chaque écart à mes journées restrictives qui me file mal au ventre. Autrement dit chaque repas constitué d'au moins un vrai plat. Et c'est en l'écrivant que je m'en rends enfin compte, en fait : je ne sais même plus. Mes notions des mesures sont complètement distordues.

 

Je crois que j'ai maigri, mais je ne sais pas trop non plus. Je me sens encore si énorme, j'ai plutôt l'impression d'avoir repris. Même si mes mensurations disent que non. A tel point qu'après une résistance d'un an et demi j'ai cédé, j'ai ressorti la balance. Sauf que même ça, ça ne m'aide pas. Ce nombre bien évidemment trop élevé à mon goût est sorti de tout contexte. Oui c'est moins qu'il y a 1 an et demi, mais est-ce que la balance est juste ? Je n'arrive pas à savoir si elle est calibrée correctement ni à savoir comment je pourrais la calibrer et ça tourne en rond dans ma tête depuis que je me suis pesée.  Et est-ce que j'étais plus bas que ça ou plus haut que ça il y a un mois, une semaine, deux jours, deux heures ? Ce nombre me perturbe encore plus que les 18 mois passés à résister à la tentation de la pesée. Ce nombre ne trouve même pas de sens, de cohérence dans la folie de mon crâne. De toutes façons c'est toujours trop.

 

Qu'ajouter à ça à part que j'ai un mal fou à me lever le matin, que je m'endors parfois à moitié en faisant autre chose, que la moindre petite action quotidienne me demande une énergie furieuse que j'ai de plus en plus de mal à puiser je ne sais où, et que je me sens apathique et sans émotion la plupart du temps, jusqu'à ce que l'angoisse vienne me rappeler que j'éprouve toujours bien quelque chose...

 

Je crois qu'on a fait le tour pour un bilan. Je pose juste ici avant de partir que j'ai rendez-vous avec un psychiatre mercredi de la semaine prochaine et que ça m'angoisse énormément. Et que dans une semaine et demi je serai seule avec mon enfant pendant un mois et que ça m'angoisse encore plus. Je ne me sens juste pas la force et je suis complètement désemparée. Je suis paralysée de peur. Je crois que c'est tout pour le moment, j'ai finalement réussi à l'écrire au moins.

 

*Je ne vois pas comment appeler ça autrement même si je ne suis très probablement pas atteinte de cette psychose au sens propre et clinique du terme.

** J'ai finalement relu. Plusieurs fois. Pour réussir à obtenir une cohérence et un truc digeste.

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22 octobre 2013 2 22 /10 /octobre /2013 13:00

Un animateur de radio a publié il y a quelques jours une vidéo style "caméra cachée" où il force des filles à l'embrasser dans la rue, se croyant très drôle. Non je ne mets pas de lien, il a suffisamment/trop de vues. Ce qu'il ne semble pas comprendre c'est que ça n'a rien de drôle et que ça fait perdurer l'idée que le harcèlement de rue est acceptable. Et il ne l'est pas. 

Un ras-le-bol général chez les femmes qui le subissent. Un ras-le-bol qui se concrétise par des articles comme ici par exemple, ou et d'autres encore (liens en fin d'article).


Alors j'ajoute ma pierre à ce ras-le-bol. Non on ne parle pas d'actes isolés. Non on ne parle pas de deux-trois types qui nous ont dit "vous êtes charmante" dans toute une vie.

Je ne peux même pas me rappeler la moitié d'entre eux, parce que j'ai une mémoire à trous, et parce que je choisis, ou mon esprit choisit pour moi, de ne pas se rappeler de tous, parce qu'il serait impossible et invivable de se rappeler tous les détails. Ce seront donc uniquement les plus marquants pour moi pour une raison ou une autre. Et attention, ça va être un peu long.

 

Je crois que je ne peux même pas remonter à la première fois, il y a bien eu les "dis camion", les soulevages de jupes et autres âneries désagréables à l'école primaire puis au collège. Le collège en lui-même a d'ailleurs augmenté ce malaise par les réflexions permanentes sur la poitrine "trop" rapidement poussée. Le surnom de "Lara Croft" à cause de cette même poitrine. Les mecs qui essayaient de la toucher ou de la voir sous les vêtements contre mon gré. Les mains au cul dans les couloirs à attendre le prof.


Mais la première fois où c'était un parfait inconnu et un adulte je m'en rappelle. C'était l'année de ma 6ème j'avais environ 12 ans donc. Un ouvrier sur un chantier sur le chemin du collège m'a hélée. Naïve, j'ai pensé qu'il avait un truc à me dire. Alors j'ai fait un crochet pour savoir quoi. Il m'a dit que j'étais charmante en m'appelant "Petite" et m'a demandé si je ne voulais pas venir faire un tour de l'autre côté du grillage qui nous séparait, j'ai eu peur, j'ai dit non et je suis partie sans me retourner pendant qu'il me hélait.

Il y en a eu plusieurs autres au cours de mon adolescence, particulièrement sur le chemin pour aller à la médiathèque, dont je ne me rappelle plus vraiment distinctement. Ils se confondent en un type vague : un homme, sans distinction de couleur de peau ou d'âge. Tous à base de "t'es charmante" "viens on va discuter". Avec un refus systématique de ma part et une petite boule dans le ventre d'inquiétude, pas encore de crainte ou d'angoisse.


Je crois que ma première insulte après un refus c'était vers 15 ans. J'étais au lycée, ça c'est certain. C'est au même âge que j'ai eu ma première grosse frayeur. J'allais au cinéma seule un mercredi après-midi et un type blanc d'une quarantaine ? cinquantaine ? d'années m'a abordée dans une rue peu fréquentée directement sans un bonjour ni rien "tu viens boire un verre avec moi ?" Je mets un point d'interrogation, mais je ne suis même pas sûre que c'était une question. J'étais surprise, je l'ai regardé sans comprendre sur le coup, il m'a attrapée par le bras et a tenté de me tirer vers lui mais je me suis dégagée et j'ai couru, couru, jusqu'à un magasin, où j'ai attendu un peu, terrorisée, en vérifiant par la vitrine qu'il ne m'avait pas suivie, je ne sais pas combien de temps, avant de retourner à mes occupations.


Vers 15 ans aussi, je descendais du bus pour rentrer chez moi. J'étais dans ma rue et je me suis aperçue qu'un mec à moto roulait bizarrement au ralenti derrière moi, une seule main sur le guidon. Je ne voyais pas ce qu'il faisait et je me disais que j'étais parano, que ça n'avait sûrement aucun rapport avec moi. Il s'est approché lentement sans parler. J'ai pris peur, j'ai bifurqué dans une petite rue adjacente sans trottoir en me disant que s'il me suivait, je ne voulais pas qu'il voit où j'habite, il m'a suivie, a tenté de placer la moto sur mon chemin, et c'est là que je l'ai vue. Sa deuxième main. Sur sa braguette. Avec un petit bout de chair qui dépassait. Sur le coup je me suis demandée si ce que je voyais était réel, si c'était bien son pénis dans sa main. A MOTO. Ca dépassait mon entendement. J'ai pris encore plus peur et j'ai profité de ce que cette rue était une impasse donnant sur un parking inateignable en véhicule de ce côté-ci. Et j'ai couru. Encore. Je suis allée dans un immeuble dont je savais la porte d'entrée sans clé, j'ai fait semblant de sortir mes clés sans me retourner au cas où il m'aurait suivi pour faire croire qu'il ne pourrait pas rentrer derrière moi, puis j'ai attendu cachée dans le hall, avant de retourner chez moi après un temps indéfini.


A 18 ans je suis "descendue" à Lyon. Jusque là ça restait épisodique, quelques fois par années. C'est devenu quotidien. Je ne sais pas à quoi ça joue... La grande ville ? Le quartier très "passant" ? Le fait que j'étais plus souvent seule ? TOUS LES JOURS. Tous les jours. Tous les jours. Réellement tous les jours. En sortant de chez moi pour aller à la bouche de métro à 10 mètres de mon entrée d'immeuble. "Vous êtes charmante" "Hé mademoiselle" "Jolie jupe" "Viens boire un verre" "T'as de beaux yeux" "T'habites chez tes parents ?' (oui, comme cliché on fait pas mieux ) "Tu suces ? " "Tu baises ?" "Sale pute nympho", il me serait impossible de dire tous les mots que j'ai entendus. Je sursautais au moindre "bonjour" à la fin. Et ce n'était que sur le chemin porte d'entrée-bouche du métro... Il y avait ensuite la cohue du métro et les gens qui se collent à toi, se frottent à toi au point que tu ne sais plus si c'est intentionnel ou pas et où tu regardes tout le monde avec méfiance. Il y a eu cette main qui a claqué mes fesses dans une rame dont je n'ai jamais su à qui elle était, je me suis retournée avec un cri de surprise et personne n'a réagi. Peut-être que d'autres l'ont vu, peut-être pas, je n'en saurai jamais rien. Il y a eu ce mec dans un tram peu peuplé qui est venu se coller à moi alors qu'il y avait de la place ailleurs, j'avais le nez dans son aisselle qui puait le déodorant musqué comme il se tenait à la même barre que moi mais en hauteur et qui s'est frotté sur ma cuisse et ma hanche jusqu'à ce que je lui hurle dessus d'arrêter ça tout de suite où j'appelais les flics. Il m'a traitée de "sale tarée" et s'est éloigné. Les quelques personnes présentes dans la rame n'ont pas bronché.


J'ai raconté ce que je vivais à mon mec de l'époque, il a dit que c'est parce que j'étais trop jolie et n'a visiblement pas compris de quoi je parlais, ni à quel point c'était violent à vivre quotidiennement. Il ne voyait pas le problème, quand il me rejoignait et qu'on sortait, on ne me disait rien. Jusqu'à un jour, où on est sortis tous les deux. J'étais en baggy récupéré d'un copain, avec un tee-shirt "Rammstein" XXL et une casquette moisie sur la tête (c'était devenu un peu mon "uniforme"). Juste pour vous situer. On se tenait par la main, on allait chercher des pizzas. On a croisé un mec. Qui m'a lancé "Oh SALOPE ? TU SUCES, HEIN ?!" en continuant son chemin. Je ne m'y attendais pas, j'étais accompagnée. D'un homme. Mon mec non plus ne s'y attendait pas, encore moins que moi. Un instant de sidération plus tard, il m'a demandé s'il avait bien entendu et si c'était bien à moi qu'il parlait. Y avait que nous dans la rue. Il était décomposé, livide. Je lui ai dit que c'était ça tous les jours. Quel que soit mon habillement. Il s'est encore plus décomposé. On est allés chercher nos pizzas, on est rentrés. Il n'arrêtait pas de dire "mais je l'crois pas, mais je l'crois pas." et de redemander "mais il a VRAIMENT dit ça ?!". C'était donc si dur à croire. Même après ce que je lui avais raconté des dizaines, des centaines de fois, même après l'avoir entendu et vu. Je crois que ce jour-là il a compris la violence du truc, mais pas encore l'aspect récurrent.


A 19 ans j'ai déménagé dans un quartier désert en me disant que j'aurais plus la paix (et c'est une chance d'avoir eu cette possibilité, tout le monde ne l'a pas), mais il y avait encore les trajets pour aller à la fac, les quelques sorties qu'elles soient en rapport avec les études ou non, les trajets pour aller la gare, la gare elle-même, les trains aussi. Où que j'aille il y avait toujours un "oh pas mal !" comme un maquignon jugerait un cheval, un "vous êtes charmante", et toujours cette obsession d'offrir un verre et cette insistance ou ces insultes lorsque je refusais. Et il y a eu cette seconde fois avec mon mec. Je m'habillais moins "sac à patates" depuis que j'habitais ce nouveau quartier, de toutes façons "l'uniforme" n'avait rien changé dans l'ancien quartier. On est sortis tous les deux, le soir, j'avais une jupe mi-longue (aux genoux quoi) et des bottes plates. A un moment, je ne sais plus pourquoi, on cherchait un truc et mon mec s'est éloigné pendant que j'attendais à un feu avec d'autres gens, dans un lieu très fréquenté. Un mec m'a mis une main au cul en me murmurant dans l'oreille "tssk tsssk salope va". Je me suis retournée et j'ai pété un plomb. J'ai hurlé, je lui ai balancé mon sac à la figure, je lui ai couru après en lui jetant des coups de pied désordonnés. Les gens au feu se sont retournés quand j'ai hurlé, ont eu l'air de rien piger, j'ai entendu un "folle" fuser, mon mec a accouru, l'autre courait à moitié retourné en beuglant des insultes, quand mon mec m'a attrapée par les épaules, il a crié "tiens ta pute". Voilà. J'étais plus juste "une pute" "une salope". J'étais "la pute de mon mec". Et il se devait de me tenir en laisse, en gros. Edifiant. J'ai continué à hurler des trucs du genre "connard de merde", j'ai gueulé sur les gens qui attendaient au feu mais étaient repartis depuis longtemps en disant que "tout le monde avait de la merde dans les yeux ou quoi ?" et puis je suis allée acheter une bombe lacrymo en flippant mon mec qui essayait de me calmer à force de répéter "putain, celui-là si je le recroise, je me le fais". C'était pas le pire vécu au cours de ces années à Lyon, pourtant. C'était juste celui de trop ce jour-là, ce soir-là, ce mois-là. Celui auquel je m'attendais pas parce que malgré notre première "mésaventure" je me croyais en sécurité avec un homme à mes côtés. Sauf qu'il était à mes côtés un peu trop loin, faut croire.


Il y a aussi eu une sortie dans ma ville natale de "retrouvailles" avec des copines du collège ou du lycée, se faire un restau, se promener, boire un verre ou deux. Un groupe de mecs plus jeunes sur une place dans le centre-ville "Hé regarde la bande de putes là, y en a des baisables dedans quand même ! " et autres trucs *agréables*. Quelques réactions dans notre groupe, des mots qui fusent, je sais plus trop quoi exactement, et des "putes putes putes salopes salopes salopes allez vous faire niquer" je me souviens juste que j'avais dit "tiens ben, ça ressemble à Lyon, là.".


Sur la même période, (18-22 ans à peu près) il y avait aussi les trajets en train. Le mec d'une trentaine d'année, blanc, qui m'a collée dans le train, monté à Lons à me blablater sa vie sans me laisser en placer une, à me raconter que son ex l'avait lâchement laissé tomber et qu'il cherchait quelqu'un pour se consoler et que j'avais l'air très "ouverte" comme fille (??!??! J'étais dans un crétin de train en jean et pull avec mon sac en train de bêtement rentrer chez mes parents. Tout ce qu'il y a de plus banale à part que je trimballais un grand tigre en peluche mité qui me servait et me sert aujourd'hui encore de coussin. C'est la peluche, le côté "ouverte" ??!?), à me dire que les filles n'étaient pas gentilles, que j'avais l'air différente, (parce que je fermais ma gueule après trois tentatives pour parler peut-être ?)  il ne me laissait pas en placer une, j'avais juste envie de dormir et qu'il se la ferme, mais j'ai rien réussi à dire. Il ne faisait que parler, parler, parler, et puis une de ses mains ses aventurée sur ma cuisse, je l'ai juste repoussée sans rien dire, il a retenté plus tard, même topo. Il est descendu au même arrêt que moi et ne m'a foutu la paix qu'en me voyant rejoindre mon père qui m'attendait sur le quai. Il n'a pas dit au revoir. Il a juste vu que je faisais "coucou" et que j'allais vers mon père et il est parti de son côté.

 

Dans le train encore il y a eu cette fois où je somnolais étalée sur les sièges d'un compartiment de corail, les rideaux tirés, il faisait nuit. Trois mecs visiblement militaires sont entrés en grand chahut, m'ont demandé si ça dérangeait pas, je leur ai fait de la place et j'ai repris ma somnolence contre la vitre. Au bout d'un moment j'me suis rendue compte qu'ils chuchotaient en me regardant et en ricanant. Y en a un qui a fini par me demander si on se connaissait pas. J'ai dit non. "Ah ben on pourrait apprendre à se connaitre alors" avec les ricanements des deux autres en fond sonore. J'ai dit que j'étais désolée mais que j'avais surtout envie de dormir, là. Il a continué à me baratiner, et qu'est-ce que je faisais dans la vie, et où j'allais comme ça toute seule, et patati et patata, j'ai fini par répondre, par lassitude, par peur aussi parce que bon j'étais seule avec eux dans un petit machin fermé et roulant. Et est-ce que j'avais un mec "oui" et c'est pas grave on est pas jaloux *ricanements*, et on peut même partager "ENTRE NOUS", et que j'étais quand même vachement bonne, et qu'à l'armée on s'ennuyait et que les filles de l'armée étaient moches, et je sais plus quelles conneries. Heureusement il restait plus énormément de temps de trajet, parce que je commençais à flipper bien bien. En descendant et après m'être assurée que mon père était dans mon champ de vision, comme ils continuaient à me pot-de-coller, j'ai dit quelque chose comme "Vous savez ? Mon mec. Il est militaire comme vous, alors ça va être pratique de lui raconter que vous êtes des gros connards lourds qui emmerdent les filles, maintenant que je connais vos noms et que je sais que vous faites partie du même régiment. " et je suis partie, avec enfin le silence derrière moi. Minuscule jouissance de rien du tout après les longues minutes à les supporter, à ne pas être agressive parce que trop peur que *ça tourne mal*. C'était même assez nul comme répartie. Mais ça leur aura au moins cloué le bec et m'aura débarrassé d'eux rapidement avant de rejoindre mon père.

 

Ensuite, j'ai eu plutôt la paix pendant un petit moment je crois, parce que j'ai fait une dépression et une sorte de phobie sociale et que je ne sortais plus de mon appartement que pour acheter le minimum vital. J'ai fini par quitter Lyon et retourner dans ma ville. Je ressortais mais uniquement pour me défoncer la tête, donc je n'ai pas de souvenirs particuliers sur le harcèlement de rue à cette époque.

Je voyais encore Lyon comme "la grande vilaine ville où les harceleurs pullulent" avant de me mettre à ressortir peu à peu et de me rendre compte qu'ici aussi il y en avait beaucoup. Je ne sais pas si ces comportements ont progressé pendant ces années, ou si je m'en rendais moins compte, ou si je trouvais ça moins agressif avant. Encore des "Hé mademoiselle !", "t'es charmante, on te l'a déjà dit ?" et les insultes. Avec une nouvelle variante que j'avais pas à Lyon : le ou les mecs en bagnole "Je t'emmène/je te dépose/tu montes/tu vas où?". Il y en a trop pour que je me souvienne de grand chose précisément.

 

 A 25 ans et des brouettes, je suis enceinte de 7 mois et quelques, je prends le bus pour aller en ville, un mec me regarde fixement. Ca me gêne, mais bon tant qu'il reste loin. Je descends à mon arrêt, le mec derrière moi. Il me pose la main sur l'épaule et "Mademoiselle ?" moi, glaciale : "Non Madame", le mec se démonte pas et me fait "Je te trouve super belle, y a moyen qu'on se revoit ? " "Revoir ? A quel moment on s'est vus en fait ? " "Ben dans le bus" "Non, moi,  j'ai rien vu. Et puis j'ai un copain, au revoir. " sa main posée sur mon bras, "Non, mais j'suis sûr il te mérite pas, et moi j'suis mieux." J'ai tellement halluciné. Je lui ai dit que j'étais enceinte, pas disponible, pas intéressée, et que là j'avais un peu autre chose à foutre alors au revoir et j'me suis barrée.


Depuis j'ai eu un bébé, je sors moins, ou avec lui. Je n'ai heureusement encore jamais eu à faire à ce genre de harcèlement avec lui, mais je sais à lire d'autres que ça peut m'arriver. Je n'ai aucune idée de comment je réagirai. Donc pour finir je vais reparler des derniers harcèlements les plus marquants vécus la nuit, et s'il y en a d'autres dans le futur, je les ajouterai à cette liste soit dans cet article soit dans un autre dédié. 


27 ans. Je suis à une soirée dans un bar. Je discute vaguement avec un mec, descend fumer une clope avec lui, de la façon la plus anodine qui soit, puis remonte les escaliers devant lui. Arrivée en haut il me claque le cul bien fort. Je me retourne, lui dit que je ne suis pas un cheval et qu'il ne recommence jamais ça. Il rigole.

 

27 ans à nouveau. Je suis dans une soirée avec Le Mââle, on vit notre vie, chacun de notre côté, on papillonne entre les gens, on discute, on boit gentiment. Je sors fumer une clope, j'entame une discussion avec un groupe de mecs dehors. Un autre à l'écart me reluque, on discute métiers ou un truc du genre. Il s'approche, se pose à côté de moi, commence à se pencher sur moi sans rien dire, je sens juste son souffle sur mon oreille, puis il tente de participer à la conversation mais en ne s'adressant qu'à moi, je réponds à la cantonnade au lieu de me tourner vers lui. Il se penche et me colle un peu plus avant de murmurer dans mon oreille que je lui plais vachement, je le repousse un peu parce qu'il m'écrase et je lui dis que oui ben je suis pas intéressée et puis je suis avec mon mec qui est à l'intérieur de toutes façons (cette "excuse" ressort TOUT LE TEMPS, réflexe idiot et totalement inutile, puisque généralement complètement inefficace). Il dit quelque chose comme "oh allez sois gentille", je ne sais plus ce que je lui ai dit mais il y avait encore un "non mais ça m'intéresse pas" dedans, j'écrase ma clope, et rentre à l'intérieur. Un peu plus tard, je ressors, retrouve le même groupe de fumeurs qui discutent, m'assois vers eux, je ne sais pas où est l'autre. On discute. Je sens quelqu'un se glisser sur la marche à côté de moi. L'autre est donc revenu. Il ne dit rien. Il se contente de rester collé à moi, toujours plus près, toujours plus collé. Je ne dis rien, je veux pas faire de scandale. Bref je ne dis rien. Je continue la discussion comme si de rien n'était. Soudain y a une main sur ma cuisse. Qui remonte tranquillement vers le dessous de ma jupe. Je prends mon souffle et je dis bien fort pour que tout le monde entende: "Mec, tu retires TOUT DE SUITE TA main de MA cuisse. Je t'ai dit NON. Et quand c'est non, c'est non. " Les autres ont vu et entendu, la conversation s'arrête, l'autre retire sa main, personne ne dit rien, un des mecs avec qui je discute nous regarde avec les yeux exorbités. La conversation reprend. L'autre reste là avec la main sur ses jambes, collé à moi. Et au bout de quelques minutes je sens à nouveau sa main sur sa cuisse, je la prend la soulève et la balance sur lui en lui gueulant que maintenant CA SUFFIT MERDE et que je vais lui tarter la gueule et que j'ai dit NON bordel. Il dit quelque chose comme "rohlala, t'es pas cool" se lève et se barre. Encore une fois la conversation s'est arrêtée à côté de moi mais personne ne dit rien ni ne commente. Il aura fallu que je me plaigne et râle plusieurs fois à ce sujet pour obtenir des "non, mais j'hallucine quoi, j'comprends pas, c'était vraiment un con celui-là"...

 

27 encore. Je promène ma chienne, un dogue allemand de 80cm et quelques au garrot, sur le trottoir le long d'une avenue proche de chez moi en début de soirée, avant la nuit. Un mec en bagnole ralentit en se collant au trottoir, me beugle quelque chose comme "Sale pute, tu baises ? Et ton chien, il baise avec toi, hein ? " J'ai un sac à crottes plein dans la main. Réflexe. Je le lance par la vitre de la voiture. Je ne regarde pas où il atterrit, je ferme mes yeux mes oreilles et je continue. J'entends la voiture repartir et je tremble un peu. Je rentre chez moi, raconte le truc sur Twitter en me traitant de folle. Je réalise que ça aurait pu être dangereux, que le mec aurait pu descendre et me casser la gueule ou je ne sais quoi. Je rigole et je flippe rétrospectivement en même temps.

 

27 ans toujours, la nuit tombée, je sors toute seule, je marche tranquillement et après avoir esquivé une voiture dans laquelle 3 mecs se promettaient de "me faire voyager" et que ce n'était pas très très sûr d'être dehors toute seule à cette heure-ci qu'il y avait des gens malsains des fois, qu'on ne savait pas sur qui on pouvait tomber et que je serais vachement mieux avec eux dans leur voiture,(je vous laisse apprécier la menace voilée), je continue mon chemin et croise un mec seul avec une grande pizza dans les mains, il me hèle "bonsoir, excuse-moi t'aurais pas une cigarette". J'accepte de lui en donner une. Je regarde bêtement sa pizza et me dit qu'il va quelque part avec et qu'il veut réellement juste une clope. Fatale erreur.

 

Le mec fouille ses poches rapidement et me fait "t'aurais pas du feu aussi ? " Allons-y pour le briquet. Et c'est parti. Comment tu t'appelles ? Tu vas où ? Tu fais quoi ? T'es très jolie. T'as pas peur la nuit toute seule ? T'as un numéro ? Le tout en parlant avec les mains et sans allumer sa cigarette, j'attends qu'il me rende mon briquet, ce qui n'arrive pas, tout en répondant poliment mais fermement à ses questions. Non je ne veux pas *le revoir*, je ne suis pas intéressée, je donne un faux prénom, qu'est-ce que ça peut faire où je vais ? , non mais je ne suis vraiment pas intéressée, non je ne veux pas aller faire une soirée avec lui. ll insiste, repose plusieurs fois les mêmes questions jusqu'à avoir une réponse. Je finis par dire que je vais rejoindre des copains qui m'attendent et que je suis justement en retard. Des copines ? Ben ça tombe bien il cherche à rencontrer des filles sur la ville, il est pas d'ici, tu comprends. Non, des copains. Bon maintenant ça serait bien que tu allumes ta cigarette et que tu me rendes mon briquet. Ah oui pardon. Il ne l'allume toujours pas. Il se place devant moi, sur le chemin que je devrais prendre pour repartir alors qu'en se croisant il était resté dans son sens de circulation, il s'approche en parlant, fait des gestes de plus en plus grands et ses mains finissent par m'effleurer. Je commence à angoisser un peu et envisage de me barrer en courant. Je lui dis que maintenant il me rend mon briquet ou je pars sans, il allume sa clope, me le donne enfin, en profite pour me poser la main sur le bras et continue sa mitraillette de questions.  Et pourquoi je suis pas intéressée ? Parce que c'est comme ça. Et si j'ai déjà quelqu'un ? Oui. Et il est sûr qu'il peut le remplacer. Je crois pas non. J'en peux tellement plus et j'arrive tellement pas à partir, vu que les quelques pas que je fais, il les suit en plaçant à chaque fois ses mains devant moi en parlant, comme pour m'arrêter, que je lui dis "je suis pas intéressée par les hommes, merci au revoir", il a un instant d'arrêt j'en profite pour pousser son bras devant moi et je marche très vite jusqu'au feu et traverse au rouge en croisant les doigts pour qu'une bagnole ne déboule pas. Il me beugle un "mais c'est dommage, mais jamais, mais vraiment jamais ? " je ne réponds pas, je me barre, j'avance, je ne veux plus rien entendre, y'en a marre.

 

C'était il y a quelques semaines. Et ça suffit.

 

Articles connexes (LISEZ-LES... VRAIMENT.):

Egalitariste : Mon cher harceleur

Une heure de peine: La drague comme violence

Traces et trajets : Une colère que je n'ai pas.

Les dégenreuses : Harceler les femmes pour le lol

Polyvalences mon pote : Textes sur les violences sexistes 

Hollaback France : Corpus de témoignages

Les questions composent : Poire le violeur, quand séduire devient faire céder

Nat Arocas : Bande de salopes !

 

Je vous invite aussi à lire les nombreux commentaires du premier article posté : Cette colère qui ne s'éteint plus, chez Beatrix, ils contiennent une quantité invraisemblable de témoignages d'autres femmes.



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25 septembre 2013 3 25 /09 /septembre /2013 23:39

L'enfer du repas.

Ce moment stressant qui rythme mes journées.

Je ne supporte pas quand il s'étire en longueur.

Avaler, gloups, gloups, miam, goinfr.

Attendre, attendre, attendre, le stress qui monte.

Les mains qui se triturent sous la table. Regarder les autres manger.

Stress à son comble.

Pourquoi ?

Parce qu'il me faut manger vite. Et qu'une fois mon repas avalé, je ne veux plus manger.

Or, ce moment d'attente insoutenable je ne sais toujours pas le gérer, alors soit je mange contre mon envie avant d'être malade et de culpabiliser, soit je stresse, soit je trouve une parade : m'occuper les mains, m'occuper l'esprit, fumer, sortir de table. 

Mais ces parades sont difficiles à gérer, elles sont surtout difficiles à appliquer.

Les longs repas de famille me sont insupportables pour cette raison.

Les repas avec un enfant qui mange à la vitesse d'un escargot en papillonnant gaiement dans tous les sens m'oppressent.

Le restaurant et ses attentes entre les plats m'angoissent.

Alors je refuse les occasions de sortie, par facilité. Pourquoi aller manger au restaurant ? C'est stressant et de toutes façons manger fait grossir. Tout le monde sait que quand je sors, je ne mange pas. C'est ainsi.

Alors j'accepte tout de même les invitations en famille. Pour voir les gens. Et je somatise comme une folle à l'avance. Et je suis sur les nerfs, au bord des larmes pour un oui, pour un non. Et je bous intérieurement, jusqu'au moment où je m'autorise à sortir fumer. Ou jusqu'au moment où j'explose à la face des convives.

Alors comme je ne peux échapper aux repas avec mon enfant, je fais avec. Et ça me fatigue de lutter pied à pied avec ma fureur, ma frustration, mon dégoût, ma colère de ne pouvoir savourer cet instant.

 

Je mange. Pour donner le bon exemple à un enfant qui a déjà un appétit de moineau. Ca me révolte de manger autant. Ca me dégoûte. Ca me fatigue. Alors parfois, souvent, je mange juste ce que je veux. Peu. Et je patiente jusqu'au moment où je ne tiens plus et où je m'éloigne pour m'occuper. Et je culpabilise de laisser mon enfant seul à table avec son dessert. Et il me fait bien comprendre que ce n'est pas ce qu'il faut faire, par des expériences culinaires toujours plus variées et plus salissantes, par des cris pour attirer mon attention. J'arrive maintenant de nouveau à gérer ma violence dans ces moments. Ces moments où elle est le plus susceptible de sortir. Mais ça passe par une distanciation, un éloignement, parfois durs à assumer. Une sensation de vide que je crée en moi et qui m'effraie.

Ne rien laisser échapper.

Inspirer. Souffler.

Raconter la dernière bêtise, souvent drôle au demeurant, à des amis ou dans l'anonymat d'un réseau social. Dédramatiser. Me couper des sentiments contradictoires qui affluent.

 

Mais le soir. Le soir, lorsque l'on n'est plus deux mais trois à table. Je ne gère plus rien. J'ai trop honte de ma "méthode" pour l'appliquer. Et le regard extérieur sur moi me gêne. Je ne me sens plus légitime à rien. Alors je laisse le stress monter en moi, parce qu'il n'y a rien d'autre à faire à part bouffer, bouffer, encore bouffer. Et bouffer ne m'empêchera pas de stresser, de culpabiliser, de m'énerver. A tous les coups l'on perd.

Ce moment où j'aimerais tant, quand j'arrive à peu près à canaliser tout ça, qu'on me foute la paix. Mais non. Le pas de côté qui va tout bousculer. Les mots, les cris, la colère, la porte qui claque, les pleurs, l'incompréhension.

 

Pourtant, toi. Toi. tu sais que les repas sont une merde à gérer pour moi, depuis toutes ces années. Ou tu l'as oublié ? Alors tes piques, tes remarques, tes indignations de moi alors que je tente d'être la zénitude incarnée... Vraiment. Fous-les dans ton cul. Parce que je ne peux plus. Je ne peux déjà presque plus en général. Mais les repas. Non vraiment ce n'est plus possible. Soit tu comprends, soit je pars, soit je meurs. Il n'y a plus que ça de possible.  Ce n'est pas une menace, c'est un constat. JE. NE. PEUX. PLUS.

 

Cette table autour de laquelle vous mangez pendant que je meurs à petit feu, doucement mais sûrement, m'enfermant dans mon monde. Ce rituel quotidien qui m'est un enfer.

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24 août 2013 6 24 /08 /août /2013 18:43

...

Je ne vais pas bien.

Ce n'est pas une plainte, c'est un constat.

Je ne vais pas bien du tout.

 

Cela fait des semaines que je jongle avec mes idées noires et mes pulsions morbides. Je n'ai aucune idée du temps que tiendront mes acrobaties bancales. Je suis fatiguée. Si lasse et fatiguée que j'ai dû mal à entreprendre et que je sens pointer la dépression.

Je ne me sens plus en phase avec rien. Je garde un masque social pour le paraître et pour me rassurer, me consoler, tenter d'en sortir. Je me dis que ce n'est qu'une phase. Je commence à la trouver longue. Et de plus en plus violente. Les pulsions se font de plus en plus pressantes. L'envie d'en finir, une bonne fois pour toutes. L'envie de disparaître. Quelques crises d'hyperphagie sans compensation. Ca faisait longtemps. De plus en plus mal à la fin des repas. La nausée. Les maux de ventre. La peur. La peur de continuer à vivre. La peur de céder à la pulsion de mort. La peur de décevoir. Mon enfant en premier lieu. Et moi-même. Nombreux sont ceux à m'avoir jugée forte parce que je suis toujours là, parce que j'ai su tirer un trait sur certains passés. La vérité c'est que je ne me vois toujours pas comme quelqu'un de fort. La vérité c'est que je me trouve misérable, pitoyable et sans avenir. La vérité c'est que j'ai peur de moi. Il ne se passe presque aucun jour depuis environ deux mois sans que je pleure. Parfois ostensiblement, parfois silencieusement et cachée. Parfois ça me soulage. Le plus souvent non. Ca me laisse un sentiment d'inachevé parce que je n'ai pas été au bout de ces foutues pulsions mortelles. Je ne sais pas si c'est de la lâcheté ou au contraire du courage. Je tente de me distraire sans y arriver vraiment. Je tente de profiter des petits bonheurs mais ils ne suffisent plus à enterrer la merde au fond de moi. Les petits plaisirs futiles que j'essaie de m'accorder sont trop fugaces pour effacer la douleur et la peur.

 

Je ne suis plus capable de gérer mon fils. Je ne suis plus capable de gérer les relations familiales. Je n'ai plus la force de le contenir dans ses colères, je n'ai plus la force de subir ses petits poings qui me martèlent en me contentant de dire non. Je lui ai mis une claque. Une claque. Sonore sur sa si jolie petite joue rebondie. Ce sont probablement des larmes d'agresseur, mais je crois qu'elle m'a fait aussi mal qu'à lui. Je voudrais mourir. Il est irresponsable de me laisser seule avec un enfant que j'aime. Je ne suis plus en état de lui apporter mon amour. Je ne suis plus en état de gérer ma souffrance et donc encore moins la sienne. Je crois que je ne suis plus en état de rien. L'ais-je jamais été ? Cet "Incapable ! " qui m'est chevillé au corps.

 

Je voudrais juste dormir. Le quotidien m'étouffe. Toutes ces petites choses qu'il faut faire parce qu'il faut les faire. Je n'y arrive pas. Je n'y arrive plus. Faire la cuisine me fatigue. Faire le ménage m'épuise. Sortir m'effraie. M'occuper de mon enfant me terrifie. J'ai peur de lui. J'ai peur de moi. J'ai peur de l'emprise qu'il a sur moi, mes sentiments. J'ai peur de l'emprise que j'ai sur lui, physiquement et moralement. J'ai peur de ma violence. A qui demander de l'aide ? Je n'arrive pas à parler. Les gens autour de moi n'arrivent pas à m'écouter. Encore moins à me répondre. Je reste avec ma terreur. Ca n'a pas de sens. Ma vie n'a pas de sens. Je suis un monstre. La vie "normale" de respect et d'amour que je nous souhaiterais est impossible tant que je serai là.

 

Je ne vais pas bien. Comment pourrais-je faire aller bien les gens qui m'entourent ?

 

Mon ventre se tord et je voudrais à nouveau mourir.

Je ne vais pas bien et je ne sais plus quoi faire.

Je crois que je voudrais juste crier au secours. Mais je n'y arrive pas.

Délétère. Comme à mon habitude.

 

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30 juin 2013 7 30 /06 /juin /2013 04:06

Me surprendre à grogner et feuler de contentement en rentrant seule à nuit noire.

Ce sentiment de toute puissance que j'avais oublié.

Je suis donc bien rentrée.

Et je pense à ce jour. Ce jour où vous ne me demanderez plus de vous confirmer que je suis rentrée sans encombre. Ce jour où vous aurez compris que je suis une lionne, une louve, une ourse. Et que ce qui pouvait m'arriver de pire est derrière moi. Ce jour où vous aurez compris que c'est ça qui fait ma force.

Je n'ai pas peur des mecs dans deux bagnoles qui m'ont hurlé des insanités sur le chemin.

Je n'ai pas peur de celui qui a carrément ralenti pour me parler et me demander s'il pouvait me ramener à bon port contre "rétribution".

Et ce n'est pas le gros mousqueton dans ma main comme un poing américain qui m'empêche d'avoir peur.

Non, ce n'est pas ça.

C'est cette conscience d'être vivante et intouchable, en quelque sorte, presque violente. Cette envie de humer la nuit.

Et de me foutre de tout. Particulièrement du connard fier, la bite à la main, le volant dans l'autre.

Que pourrait-il me faire qui m'effraierait de toutes façons ? Que pourrait-il me faire que je ne connaisse déjà ?

C'est lui qui devrait avoir peur. Peur de moi, de ma force, de ma joie, de ma colère, de ma rage, de ma morsure.

Il ne le saura jamais parce que j'ai préféré regarder les étoiles en souriant et en respirant l'odeur de la nuit.

C'est peut-être la seule chose que je regrette. Il ne saura pas. J'ai continué ma route la main dans le feuillage humide des haies.

 

J'aime la nuit. J'aime la rue. Elles sont à moi, et personne ne m'enlèvera ça. Même si j'ai un vagin et pas une bite. Personne.

Et pour ceux qui s'inquiètent : oui, votre inquiétude est touchante. Mais elle est glaçante. Vous avez peur d'un truc dont je me fiche.

Le jour où je me suis fait violer, il ne faisait pas nuit. Le second viol, je n'étais pas dans la rue.

La fois où j'ai pris le plus de coups je n'étais pas dans la rue avec un inconnu.

La fois où j'ai eu le plus mal c'était avec quelqu'un que j'aimais

La fois où j'ai eu le plus peur, j'étais seule.

Alors rentrer chez moi seule la nuit c'est une délivrance. Un bonheur intact. Ce fameux sentiment de puissance que personne ne pourra briser.

 

J'aime la nuit. J'aime la rue. J'aime caresser les feuilles que je croise en écoutant le vent et les voitures au loin.

J'aime l'odeur du goudron qui se refroidit après le soleil ou qui se réchauffe après la pluie.

J'aime l'odeur de terre humide qui se dégage de l'herbe en bordure de route.

J'aime même l'odeur de sueur et d'essence du mec dans sa bagnole qui s'adresse à moi depuis sa vitre baissée.

Je suis un animal nocturne. La nuit est un refuge pour oublier les terreurs du jour. Et rien ne peut m'y atteindre.

Et je rentre chez moi en paix avec moi-même et le monde.

 

Ne vous inquiétez pas.

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